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Le réseau de l'Ouest n'a pas la réputation d'avoir créé des locomotives d'avant garde. Pourtant, il a été un des premiers à utiliser l'électricité sur son réseau, sur trois curieux engins: les locomotives vapeur-électriques.
Voici une brève description de ces drôles de machines.
1892: la fusée électrique de HeilmannDe nos jours une machine électrique sous-entend une locomotive qui capte son énergie le long d'une caténaire, ce fil tendu au dessus de la voie.
Lorsque Mr Jean Jacques Heilmann qui dispose de la Société Industrielle de Moteurs électriques et à Vapeur située au Havre, a l'idée d'utiliser l'électricité en 1892. Il s'agit pour lui surtout de palier à l'inconvénient que présente les bielles sur une machine à vapeur: éviter les mouvement alternatifs. Ceci le conduit à imaginer de remplacer ces éléments par des moteurs électriques, entrainés par un générateur lui mème entrainé par un moteur à vapeur alimenté par une chaudière à vapeur. Il obtient un brevet pour ce dispositif le 18 juillet 1890.
Il fait réaliser une locomotive pour en tester le principe aux Forges et Chantiers de la Méditerannée au Havre.
L'ensemble pesant 110 tonnes est ainsi constitué d'une chaudière, dont la cheminée est dirigé vers l'arrière de l'engin, d'un générateur électrique de 400 kWsitué à l'avant , et protégé par un carénage en bois. L'ensemble est monté sur un chassis de 16,31m hors tampons porté par deux bogies de 4 essieux chacun, tous les essieux étant motorisés par des moteurs électriques de 60ch. L'entraxe des bogies est de 7.75m.
La "Fusée électrique" prototype de Heilmann en 1892 (source Gallica BNF) L'ensemble à une allure curieuse, et est baptisé "fusée électrique". Si les essais montrent une réelle souplesse de conduite et de stabilité, l'engin ne mérite pas son nom de fusée!! Il dépasse difficilement les 100km/h, et le rendement faible de l'ensemble ne donne qu'environ 150ch à la traction, les autres 250ch étant nécessaires pour le déplacement de l'engin lui meme. C'est sans doute ce faible rendement qui amene Heimann à ne pas réaliser les deux voitures voyageurs initialement prévues. Elles devaient être équipées de bogies moteurs identiques à ceux de la machine, afin de participer à l'effort de traction.
Malgré ces résultats peu encourageants, la Compagnie de l'Ouest utilise la "Fusée électrique" en service régulier sur la ligne Paris-Mantes par Argenteuil, afin de tester l'endurance du système, et lui fait parcourir plus de 1900km..
1893: Les locomotivesLe réseau de l'Ouest s'interesse à ce concept et fait réaliser deux engins sur le principe de la machine de Heilmann. Elles sont numérotées 8001 et 8002.
On retrouve des dispositions semblables au prototype: Générateur de vapeur, moteur à vapeur, génératrice, bogies à 4 esseiux chacun.Toutefois, ces machines se distinguent par un carénage en acier, et surtout par un moteur à vapeur de 1350ch comprenant 12 cylindres.
Une vapeur électrique du réseau de l'Ouest en 1893. L'engin de 125 tonnes doit théoriquement développer 1000ch aux roues. Cependant la capacité réduite des caisses à eau des locomotives nécessite l'ajout d'un fourgon disposant de 20m3 d'eau supplémentaire, afin de réaliser des parcours de 3 heures comme les machines classiques. L'ensemble loco+ fourgon pese alors 170 tonnes, contre 80 tonnes pour une machine classique.
Par ailleurs, la conduite de ces engins nécessite la présence de trois personnes: chauffeur, mécanicien et un "pilote électricien".
Aussi l'utilisation des "vapeurs électriques" demeurre sans lendemain...
* * * Sans lendemain, pas vraiment: car en 1895 les bogies seront réutilisés pour réaliser deux engins:
- Une locomotive électrique à quatre essieux. captant le courant sur un fil tendu,
- Une locomotive à quatre essieux captant le courant sur un troisième rail...
Reproduction en modelismeCes engins n'ont pas fait à ma connaissance l 'objet d'une reproduction en modelisme.
Pour en savoir plus:
- article de l'Illustration sur la "Fusée Electrique" (1892)
- Rail Magazine n°??